Vers plus d’harmonisation européenne et de qualité dans les IVD

Jusqu’à récemment, la règlementation en matière de dispositif médical et d’IVD était constituée de directives européennes. Les pays membres devaient donc transposer les directives dans leur propre législation nationale, ce qui entrainait le désavantage de créer des divergences. De plus, ces directives dataient de la fin des années 90. En près de trente ans, le monde des dispositifs médicaux et des IVD a énormément évolué. Une sérieuse mise à jour de la législation s’imposait donc.

En 2017, l’Union européenne (UE) publiait des règlements sur le sujet. Ces textes ne laissent qu’une petite marge de manœuvre aux états membres pour imposer des dispositions nationales. En effet, la plupart des articles ne sont pas sujet à interprétation : les règles doivent être mises en œuvre dans leur intégralité sur tout le territoire de l’UE. Ces nouvelles législations, entrées en vigueur en mai 2021 pour les dispositifs médicaux et en mai 2022 pour les IVD, ont un impact énorme sur le fonctionnement des fabricants mais aussi des importateurs, distributeurs, professionnels de santé, hôpitaux et sur les experts de notre agence.

C’est quoi, les IVD ?

IVD signifie « in vitro » diagnostics. Cet acronyme désigne les tests utilisés sur des échantillons humains pour donner des informations médicales pour, par exemple, poser des diagnostics sur les patients, vérifier la compatibilité entre donneur/receveur, définir un traitement. Parmi les IVD, il y a les tests COVID, les tests VIH, les tests de grossesse, les tests de groupage sanguin … Environ 80 % des traitements des patients commencent après avoir utilisé un IVD. C’est donc un groupe très important parmi les dispositifs médicaux.

Gros changement dans le processus de mise sur le marché

L’un des changements les plus conséquents du nouveau règlement sur les IVD réside dans les conditions de mise sur le marché. Pour mettre un IVD sur le marché, les fabricants doivent établir une déclaration de conformité pour leurs IVD qui atteste qu’ils sont conformes à la législation en vigueur. Sous l’ancienne législation, pour la majorité des IVD, les fabricants restaient les seuls intervenants dans l’évaluation de la conformité de leurs IVD. Et dans une minorité des cas seulement, le fabricant devait faire appel à un organisme notifié (société externe désignée par les autorités des états membres) pour certifier leur dispositif avant d’établir leur déclaration de conformité. Avec la nouvelle législation, c’est l’inverse. Dans la majorité des cas, les fabricants doivent passer par un organisme notifié.

Un autre changement important est la création des laboratoires de référence pour des IVD au niveau européen. Ces laboratoires, qui devraient entrer en fonction fin 2023, auront pour mission de contrôler la performance des IVD les plus à risque.

IVDR

Les experts dans le domaine des IVD

Beaucoup de positif … et quelques points à améliorer

Le recours presque systématique à des organismes notifiés change beaucoup de choses : auparavant, seuls 20 % des IVD devaient passer ce genre de contrôle. Aujourd’hui, on parle de plus de 80 %. Ce nouveau fonctionnement a bien des avantages, dont celui – essentiel – d’assurer une meilleure qualité en termes de sécurité et de performances des IVD présents sur le marché européen. Malheureusement, cette manière de faire s’accompagne aussi des désavantages : la certification prend du temps (d’autant que, pour le moment, il y a encore trop peu d’organismes notifiés désignés ), comporte de nombreuses exigences administratives et a un coût non négligeable. Certains fabricants préféreront donc peut-être retirer (une partie de) leur IVD du marché plutôt que de suivre tout le processus de certification.

Un gros chantier

Cette nouvelle législation a donc de nombreux avantages pour les consommateurs de l’UE mais ajoute une masse de travail non négligeable aux fabricants. Et pas seulement. Les équipes de l’AFMPS ont également dû s’adapter. Il faut accompagner tous les acteurs vers tous les changements (y compris celui, assez important, de modifications majeures dans les classes d’IVD), les guider dans les nouvelles procédures et manières de fonctionner et répondre aux nombreuses questions. Ce travail se poursuivra certainement dans les années à venir.

Par ailleurs, le processus de certification sous le règlement étant encore à ses débuts, certains fabricants se retrouvent sans certificat pour leurs IVD. C’est pourquoi, la Commission européenne a mis en place des périodes de transition afin de limiter les pénuries sur le marché. La plupart des IVD qui étaient conformes à la précédente législation peuvent sous certaines conditions continuer à être mis sur le marché, et ce jusqu’en 2025-2027 dépendant de la classification de l’IVD. Dans des cas exceptionnels, il est également toujours possible pour l’AFMPS d’octroyer des dérogations pour mettre sur le marché un IVD dont le fabricant n’aurait pas terminé son évaluation de conformité, et ce à la demande du fabricant. Ce processus est d’autant plus important pour les IVD d’importance critique qui ne pourrait plus être mis sur le marché en raison de ce changement de législation (voir l’encadré sur l’Advisory Board).

IVDR advisory board

La transition est en cours

Que les consommateurs se rassurent, il n’est pas (encore) question de pénurie d’IVD sur le marché européen. Les pays de l’UE sont actuellement en période de transition. Au fil des années, de plus en plus de d’IVD seront conformes au règlement. De plus, courant 2024, Eudamed, une base de données commune qui devait être finalisée en 2020 mais dont le développement a pris du retard à cause de la crise sanitaire, devrait être disponible dans son entièreté. A partir de la publication officielle d’Eudamed, les obligations liées à cette base de données commenceront à entrer en vigueur. Les acteurs liées aux dispositifs médicaux et IVD seront dans l’obligation d’introduire différentes informations telles que les coordonnées des acteurs, les informations liées aux dispositifs médicaux et IVD, les certificats, les données de traçabilité, les incidents … En principe, courant 2026, toutes les données devront être enregistrées. L’AFMPS et les autres autorités compétentes des états membres pourront ainsi accéder à de nombreuses informations facilitant la surveillance du marché. Ce qui exigera un changement dans les processus internes à notre agence.

La nouvelle législation en matière d’IVD vient donc avec son lot de challenges, notamment pour les fabricants mais aussi pour l’AFMPS. Mais, dans les années à venir et avec la finalisation de certains gros chantiers (désignation des organismes notifiés et des laboratoires de référence de l’UE et Eudamed), les patients européens pourront bénéficier d’IVD plus sûrs et plus facilement traçables. L’AFMPS participera avec professionnalisme et expertise à tous les changements à venir.

En cas d’urgence …

Si un IVD, que ce soit un IVD précédemment conforme à la directive ou un nouvel IVD, n’a pas pu obtenir à temps son certificat CE sous le règlement (obligation qui reste encore difficile à respecter à cause d’un nombre trop faible d’organismes notifiés désignés), il est donc possible pour l’AFMPS d’accorder une dérogation temporaire au fabricant à sa demande pour mettre ou continuer à mettre son IVD sur le marché. Ces dérogations ne sont évidemment accordées à la légère : elles ne se justifient que si elles sont nécessaires à la santé publique ou la santé ou à la sécurité du patient. C’est le cas quand un produit est essentiel à des patients et qu’il n’existe aucune alternative sur le marché belge. Ces dérogations peuvent s’appliquer pour les dispositifs médicaux ou pour les IVD. Pendant la crise du coronavirus, cela a par exemple été le cas de masques chirurgicaux (dispositifs médicaux) qui respectaient les normes européennes mais n’avaient pas le marquage CE ou encore pour des autotest antigéniques pour la COVID-19 (IVD) qui étaient en cours de certification. Plus récemment, un produit essentiel pour la transplantation d’organes aurait pu disparaître du marché pour des raisons administratives. Il a obtenu une dérogation. En 2022, ce genre de dérogations temporaires ont été accordées pour une soixantaine de dossiers.

Advisory board (IVDR)

Les membres de l’Advisory Board

La décision d’octroi d’une dérogation, même temporaire, ne se fait évidemment pas à la légère. Ces dossiers sont discutés à l’Advisory Board, un organe interne composé de toutes les équipes qui gèrent les dispositifs médicaux et les IVD au sein de l’AFMPS. L’Advisory Board se réunit tous les quinze jours ou à tout moment en cas d’urgence. Il fournit un avis sur des dossiers problématiques tels que des demandes de dérogations, mais aussi des incidents qui justifient des rappels de produit ou non, des arrêts d’investigations cliniques … Les avis sont fournis à l’administrateur général de l’AFMPS ou son délégué qui prend la décision finale. L’objectif est d’avoir l’input de chaque partie (étude clinique, incident éventuel …) avant de fournir un avis aussi rapide (la question est souvent réglée en quelques jours) qu’éclairée sur la prise d’une décision. Comme dans tous les autres aspects de leur travail, les experts de l’AFMPS ont comme priorité la santé des Belges et la continuité de leurs soins sans négocier sur la qualité, l’efficacité et la sécurité des produits qui se trouvent sur le marché.

Nos experts AFMPS

  • Stijn Schouteden appartient à la division Dispositif médicaux de la direction générale Inspection en tant qu’inspecteur notamment pour tout ce qui concerne les IVD.
  • Jeroen Poels appartient à la cellule Dispositifs médicaux de la direction générale POST autorisation, où il coordonne tout ce qui concerne les IVD aux côtés de deux autres collaborateurs. Julie Duquesne et Ranya Moudallel appartiennent à la cellule Dispositif médicaux de la direction générale POST autorisation, où elles participent à l’application du nouveau règlement IVD et aux traitements des différents dossiers.
  • Alexandre Jauniaux dirige la cellule Dispositifs médicaux, dans laquelle il essaye d’augmenter au fil du temps l’expertise sur les IVD.
  • Damien Lambot, de la cellule Dispositifs médicaux, se charge principalement des dérogations aux nouveaux règlements et s’occupe notamment de la gestion de l’Advisory Board de l’AFMPS aux côtés de Lotte Vansteelant.
  • Lotte Vansteelant, de la cellule Dispositifs médicaux, se charge principalement des dérogations aux nouveaux règlements européens et participe à la gestion de l’Advisory Board.

AFMPS logo

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